Un ailleurs
Et puis on sait que l’on ne reviendra plus
Que le temps n’est plus le temps d’avant connu
Où l’on ne vivait pas vraiment sans savoir exactement pourquoi
On sait que le temps est redevenu temps
Le temps à soi le temps assis et contemplant
Le temps miroir sur l’eau le temps sentiment
On sait le temps des gens que l’on rencontre
Avec qui on parle de l’amour de la mort
Car tout est là révélé étincelant
On sait le temps on le sent passant en soi
Le temps de la brume le temps de la pluie
Le temps de l’herbe sèche le temps du soleil puissant
Et puis on aime tout tant l’impatience n’est plus
Que l’on a le temps de tous les rêves
Le temps de tout tisser le temps de tout tresser
Le temps de la peinture le temps de l’écriture
Le temps de la lecture du ciel-page des arbres-livres
Le temps de l’écorce le temps de la peau-fruit
On sait que l’on ne reviendra plus
Que l’on est devenu femme du fleuve passant
Que l’on est devenu homme de la forêt chantante
On sait que l’on ne reviendra plus
Dans le monde des villes perdues
Des villes au triste sort
Que l’on a jeté sa montre son passeport
On sait un monde
On sait un ailleurs
Un monde sans autre horloge que l’âme le cœur
Où passent les pirogues reviennent les oiseaux migrateurs
Où la voie lactée mariée d’aurore
Accueille d'où qu'il vienne le voyageur
HDN Octobre 2019