Join Earth Belong To All of Us (4 part 1 )
Journal de bord. Bienvenue, Roy. Vous pouvez commencer la sécession.
Bonjour, Tarls. Un mois et une semaine que nous sommes partis de la base Terre. Nous ne comprenons toujours pourquoi la lune a eu cette couleur bleue, il y a quelques mois.
Sinon, comment te dire Tarls, je me suis toujours posé la question, dès que j’ai pris conscience de ma condition de Premium Person, appartenant à la classe des Êtres Avenir : quelle aurait été ma vie si j’avais habité de l’autre côté de la frontière, du côté des non évacués ?
Mais pas seulement : qu’aurai-je été si, dans le Monde habitable, ma famille avait été classée dans les Inutiles ? Un esclave de plus que les Big Datas auraient vite fait de surveiller et de ficher ? Un joueur de Super World Reality, immergé vingt heures par jour dans le Bigger Virtual World ?
Mes parents ont toujours été clairs avec ma sœur et moi. Depuis des générations, Il fallait s'arracher pour vivre !
Mon histoire familiale, confirmée par mes recherches généalogiques, facile avec les datas centers, mettait en évidence le rôle de notre aïeule, une arrière-grand-mère lointaine qui, lors de l’Effondrement, avait agi et assuré comme pas possible !
Seule, son mari étant parti en zone interdite, elle avait regroupé sa famille dans sa maison, garantissant à ses enfants et à ses descendants une vie sécure et un avenir. Elle avait compris au bon moment que, la liberté étant finie, c’était la sécurité qui primait sur tout.
La maison, je la revois. Elle est toujours en moi. J’y ai vécu une enfance presque heureuse. Fallait faire attention au dôme Ombre qui « bredouillait » de temps en temps. Fallait ne pas toucher aux archives de la famille. Mais, ma sœur jumelle et moi n’avons jamais manqué d’eau. Et puis, c’était beau, autour, ce restant de garrigue.
Ma sœur l’a considérablement modifiée, comme l’ont fait mes parents d’ailleurs. Cependant, y flotte toujours comme un parfum de bien-être. Très rare dans notre époque post humaniste.
Cette femme, quelle personnalité ! Grâce à elle, toute sa descendance a pu travailler, certes comme des dingues mais travailler avec tous les droits que cela ouvre encore aujourd’hui. Pas d’autre choix possible pour tout le monde. Ne faisant pas partie des Honors Owners, il fallait que nous nous signalions, et cela dès la crèche qui coûtait une fortune aux parents. Moi, je n’aurai pas d’enfant. Ma vie est trop risquée. Enfin, c'était une certitude jusqu'à hier soir.
Je me suis aperçu que ma sœur et moi avions eu tout un faisceau de chances finalement.
Être nés en zone habitable, çà je l’ai dit. Avoir cette parente éloignée qui comprit ce qui se passait et cette maison, dit aussi. Avoir hérité, génération après génération, merci mes parents, d’une volonté farouche, totale de s’en sortir et donc de travailler tout le temps, sans relâche, je l’ai dit aussi. Vu l’époque, c’est rarissime.
Mais je ne peux que comprendre aussi qu’avoir eu dans mes gênes ce sens de l’engagement, hérité de mes ascendants, me permettra d'être distingué et parvenir à des fonctions à grandes responsabilités, sur le terrain comme dans les sphères B de décision. Cet héritage fut déterminant. Ça, c’est une certitude.
Et c'est valable pour ma sœur jumelle qui, dans le sillage de notre mère, est une grande spécialiste de l’ADN. Elle vient d'être nommée directrice générale du Bio Artificial Intellegency Research Center ! A quarante-deux ans, faut le faire. Fier d'elle !
Cette capacité « à voir » ce qui fallait anticiper nous permit à tous de nous en sortir, menant, maintenant avec honneur, une vie plus qu’acceptable en ces temps de refondation comme le clament nos dirigeants politiques.
Quand je suis débarqué sur un terrain inconnu et que les données numériques sont erronées, je « sais » où passer, comme guidé par un sixième sens.
Et puis le gout du risque, du voyage. J’en suis complètement héritier. Aujourd’hui, en ce moment où j’écris, je mesure cette vraie chance.
HDN Novembre 2019
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